RENÉ GUÉNON
Correspondance avec Jean Tourniac
Le Caire, 11 octobre 1938
[…] Pour la question de votre ami, je suis assez embarrassé, pour les mêmes raisons ; puisqu’il s’intéresse à la « mythologie » hindoue (où, pour nous, il n’y a point de « personnages », mais une expression symbolique de principes), je pourrais au moins lui recommander les travaux d’A. K. Coomaraswamy, mais malheureusement ils sont, pour la plupart, dispersés dans de multiples publications peu faciles à trouver…
Je n’ai point « embrassé la religion musulmane », à une date plus ou moins récente, comme certains veulent le faire croire pour des raisons qui échappent à ma compréhension ; la vérité est que je suis rattaché aux organisations initiatiques islamiques depuis une trentaine d’années, ce qui est évidemment très différent. Je n’ai pas vu l’article des « Nouvelles Littéraires » auquel vous faites allusion, mais je me doute assez de ce que cela peut être, si j’en juge par un autre qui a paru dans l’« Intransigeant », et qui n’est qu’un tissu de faussetés et de perfidies ; que penser d’un individu qui prétend m’avoir rencontré, alors que j’ignorais même son existence avant de voir l’article en question ? Je ne sais d’ailleurs ce qu’il serait possible de faire pour empêcher le chien d’aboyer, je veux dire les journalistes de débiter des mensonges et de se mêler de choses qui ne regardent en aucune façon ni eux ni le public !
Croyez, je vous prie, monsieur, à mes sentiments très distingués.
René Guénon
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