HEINDEL Vue et pénétration spirituelles




MAX HEINDEL

Cycle de conférences du Christianisme 
de la Rose-Croix

1908


Onzième Conférence 

VUE ET PÉNÉTRATION SPIRITUELLES 


Lorsque nous disons "vue spirituelle" nous ne parlons pas symboliquement, ou d'une chose vague, une sensation d'extase, mais d'une faculté bien définie, aussi réelle que la vue physique. Cette faculté est autant nécessaire à la perception des mondes spirituels et à la véritable pénétration des conditions hyperphysiques, que la vue physique est indispensable à la pénétration approfondie des choses matérielles. 

La vue spirituelle dont nous parlons ne doit pas être confondue avec la clairvoyance développée dans les cercles spirites. Cette dernière dépend d'un état mental négatif, où les mondes intérieurs sont réfléchis dans la conscience des assistants, comme le paysage environnant est réfléchi dans un miroir. Par une telle méthode, le clairvoyant peut arriver à voir, mais la pénétration spirituelle de la chose considérée manque au clairvoyant négatif tout autant qu'un miroir: il est dans une position semblable à celle d'un homme lié sur un cheval sans rênes ni brides, emporté partout où il plaît au cheval d'aller. Une telle faculté est une malédiction. Le clairvoyant correctement formé n'est pas lié; il peut se mettre en selle ou descendre comme il lui plaît, il a rênes et brides sur son cheval; il en est le maître, l'autre en est l'esclave. 

Certaines phases négatives de la clairvoyance peuvent aussi être développées par l'absorption de stupéfiants, par la contemplation d'une boule de cristal, etc. Dans tous ces cas, cette faculté est préjudiciable, parce qu'elle n'est pas soumise à l'esprit. Les stupéfiants ont un effet terriblement destructeur sur les différents véhicules de l'homme. Mais la méthode la plus dangereuse de développement est celle des exercices respiratoires inconsidérés. Beaucoup de personnes sont aujourd'hui dans les asiles d'aliénés, ou sont mortes de tuberculose, parce qu'elles ont pratiqué des exercices respiratoires enseignés par des personnes aussi ignorantes que leurs élèves. Si jamais ils sont nécessaires, les exercices respiratoires ne sont jamais donnés pour des groupes, car la constitution de chaque élève est différente; chacun a donc besoin d'exercices individuels, accompagnés d'exercices mentaux différents. C'est seulement par l'instruction individuelle, donnée par un maître compétent, que la vue et la pénétration peuvent être développées en parfaite sécurité. Les remarques ci-dessus s'appliquent seulement aux exercices respiratoires pour le développement spirituel, et non aux exercices respiratoires de la culture physique, qui sont excellents s'ils sont pratiqués avec modération. 

Maintenant se pose la question: comment peut-on trouver le véritable Instructeur et comment le distinguer de l'imposteur? C'est une question importante, car lorsque l'aspirant a trouvé un bon Instructeur, il est en sécurité; il sera gardé contre la majeure partie des dangers auxquels sont exposés ceux qui, par ignorance ou présomption, suivent leur propre voie et cherchent les pouvoirs spirituels sans s'efforcer de se développer moralement. 

"Vous les reconnaîtrez à leurs fruits", disait le Christ (Matthieu 7:16), et comme la scolarité ésotérique exige de l'élève l'absence de motifs égoïstes, il est facile d'en conclure que l'Instructeur doit posséder cet attribut à un degré encore plus élevé. Si quelqu'un se proclame et offre de vendre sa connaissance à tant la leçon, il tombe au-dessous du niveau demandé pour les élèves; qu'il ait besoin d'argent pour vivre, ou toute excuse du même genre pour faire payer son enseignement, autant de sophismes: la loi cosmique prend soin de celui qui travaille avec elle. Tout enseignement offert sur des bases commerciales n'est pas la science suprême: celle-ci n'est jamais échangée contre une rémunération réelle ou implicite. Elle est donnée à quiconque comme un droit qui résulte de son mérite; même si le véritable Instructeur ne voulait pas instruire une certaine personne, il y serait contraint par la Loi de cause à effet si c'était mérité. Une telle attitude serait d'ailleurs inconcevable, car c'est toujours une joie infinie pour les Frères Aînés de l'humanité lorsqu'un être commence à suivre la voie de la vie éternelle. Pourtant, si désireux qu'ils soient de révéler leur secret, nul ne peut le recevoir avant d'avoir prouvé par sa constance et son altruisme qu'il pourra être un sûr gardien d'un immense pouvoir qui pourrait être employé pour le mal comme pour le bien. Si nous permettons à nos passions de prendre le dessus, si la cupidité est le mobile de nos actions, nous empêchons le progrès au lieu d'aider notre prochain. Tant que nous n'avons pas appris à utiliser correctement les pouvoirs que nous possédons, nous ne sommes pas prêts pour le grand travail demandé à ceux que les Frères Aînés ont aidé à développer leurs facultés latentes, puis à acquérir la perception intérieure qui donne à la vue spirituelle sa valeur en tant que facteur de l'évolution. 

C'est pourquoi "le Sentier de la Préparation" précède "la voie de l'Initiation". Persévérance, Consécration, Observation et Discernement: tels sont les moyens d'y parvenir, car par eux que le corps vital est sensibilisé. Par la persévérance et la consécration, les éthers chimique et l'éther-vie deviennent capables de se charger des fonctions vitales dans le corps physique pendant le sommeil. Une division se fait entre ces deux éthers et les deux éthers plus élevés, éther-lumière et éther-réflecteur. 

Quand ces deux éthers ont été suffisamment spiritualisés par l'observation et le discernement, une simple formule donnée par l'Instructeur rend le disciple capable de les extérioriser à volonté avec ses corps supérieurs; il est ainsi muni d'un véhicule doué de perception sensorielle et de mémoire. Toutes les connaissances qu'il possède dans le monde matériel lui sont alors accessibles dans les mondes spirituels; et il apporte à son cerveau physique les souvenirs des expériences réalisées pendant qu'il était hors de son corps physique. Tout cela est nécessaire pour pouvoir agir en dehors de ce corps avec la pleine conscience, à la fois du monde physique et du monde du désir. Car le corps du désir n'est pas encore organisé actuellement; et si le corps vital ne laissait pas sur lui son empreinte au moment de la mort, nous ne pourrions avoir aucune conscience dans le monde du désir pendant l'existence d'après-vie. 

Des exercices respiratoires inconsidérés ne produisent pas cette division, mais tendent à extraire le corps vital tout entier du corps dense; dans certains cas, les connexions entre les centres éthériques de sensation et les cellules cérébrales sont rompues ou tendues, ce qui aboutit à la folie. Dans d'autres cas, la séparation se produit entre l'éther-vie et l'éther chimique; comme l'éther-vie constitue à la fois le matériau de cémentation dans l'assimilation, et la voie particulière d'utilisation de l'énergie solaire, cette rupture aboutit à la tuberculose pulmonaire. 

Seuls, des exercices appropriés peuvent produire la séparation correcte. Lorsque la pureté de la vie a dirigé vers le haut, à travers le coeur, la force sexuelle inemployée élaborée dans l'éther-vie, cette force se charge de la circulation limitée nécessaire pendant le sommeil. C'est ainsi que les fonctions physiques et le développement spirituel sont menés côte à côte selon des procédés appropriés et harmonieux. 

Ceci est la raison du voeu de chasteté fait par ceux qui se vouent entièrement à la vie supérieure. 

Il n'est pas nécessaire pour un débutant de vivre dans l'ascétisme; la continence absolue n'est actuellement nécessaire qu'à une minorité. Pour le présent, l'union des sexes est la méthode de procréation. Il n'est pas d'autre moyen de procurer des corps aux Egos qui renaissent, et c'est le devoir de tout être sain d'esprit, de coeur et de corps, de fournir un véhicule et une possibilité d'existence à autant d'esprits en voie de renaissance que ses moyens et les circonstances le lui permettent. Nous devrions considérer l'acte de procréation comme un sacrement, non pour la gratification des sens, mais dans un esprit de prière. Employée de cette façon, pour la génération, la force sexuelle n'est nécessaire que quelques fois dans la vie de toute personne; le reste peut légitimement être utilisé à l'amélioration de soi-même. 

Le DISCERNEMENT est la faculté grâce à laquelle nous distinguons ce qui est important, essentiel, de ce qui ne l'est pas, séparant le réel de l'illusoire, et le permanent du temporaire. Dans la vie ordinaire, nous sommes habitués à considérer le corps comme notre "moi". Le discernement nous apprend que nous sommes des Esprits et que nos corps ne sont que des demeures provisoires, des instruments pour notre usage. Le charpentier emploie le marteau et la scie; ce sont des outils importants, mais il ne se considère pas lui-même comme étant l'un ou l'autre. Nous ne devons pas nous identifier avec nos corps, mais apprendre à discerner, à considérer notre corps comme un serviteur, précieux certes, mais seulement dans la mesure où il obéit à nos ordres. En le considérant ainsi, nous nous apercevons que nous pouvons réellement lui faire accomplir beaucoup de choses considérées jusqu'ici comme impossibles. Le discernement fait naître l'âme intellectuelle, et donne à l'homme son premier élan vers la vie supérieure. 

L'OBSERVATION est l'emploi de nos sens comme moyens d'obtenir des informations sur les phénomènes qui nous entourent. L'observation et l'action produisent l'âme consciente. 

Il est de la plus grande importance pour notre développement que nous observions avec précision les vues et scènes autour de nous, sinon les images de notre mémoire consciente ne correspondront pas avec les enregistrements automatiques du subconscient. Le rythme et l'harmonie du corps dense sont troublés en proportion de l'inexactitude de nos observations pendant la journée. Nos activités pendant le sommeil rétablissent partiellement l'harmonie. Mais les vibrations discordantes renouvelées de jour en jour et d'année en année, sont un des causes qui graduellement durcissent et détruisent notre organisme; celui-ci finit par devenir impropre à l'usage de l'esprit, lequel doit l'abandonner pour avoir une autre occasion de développement dans un corps nouveau et meilleur. Dans la proportion même où nous apprendrons à observer avec précision, nous gagnerons santé et longévité, et nous aurons besoin de moins de repos et de sommeil. Ceci est un fait important, comme nous le verrons plus loin. 

La CONSÉCRATION à un idéal élevé met un frein aux instincts vils et bas. C'est ainsi que se forme l'âme émotionnelle et qu'elle se développe. Cultiver cette faculté est essentiel. Chez certains, c'est la ligne de moindre résistance, et ceux-là tendent à devenir des rêveurs mystiques; les énergies du corps du désir s'expriment alors en enthousiasme et extase religieuse. Il est par contre des gens qui développent anormalement la faculté de discernement, ce qui les mène aux spéculations métaphysiques froides et intellectuelles. Dans l'un et l'autre cas, il y a manque d'équilibre et danger. Le rêveur mystique, parce que dominé par l'émotion, peut devenir sujet à toutes sortes d'illusions. Cela, l'occultiste intellectuel ne le sera jamais, mais il peut aboutir à la magie noire s'il poursuite le chemin de la connaissance pour cette seule connaissance et non pour servir ses semblables. La seule voie sûre est de développer à la fois la tête et le coeur. 

L'Occultiste se développe dans une direction intellectuelle; il cherche la vérité par l'observation et le discernement; il observe, et raisonne sur ce qu'il voit. Il atteint ainsi la connaissance; mais comme le dit Paul, "la connaissance enfle, mais l'amour édifie" (I Corinthiens 8:1); et avant que la science puisse lui être utile dans son développement spirituel, l'occultiste doit apprendre à la sentir, sinon il ne saurait la vivre. 

Lorsqu'il a réussi à le faire, il est à la fois mystique et occultiste. 

Le Mystique qui développe particulièrement la faculté de consécration, sent la vérité sans avoir besoin de raisonner. Il sait, mais ne peut ni donner la raison de sa foi, ni l'expliquer aux autres pour les aider. Il doit développer le côté intellectuel de sa nature, pour être le plus possible utile au développement de l'humanité; alors seulement l'intelligence agit comme un frein sur les émotions, et par ailleurs la consécration guide sûrement l'intelligence. Si nous suivons exclusivement l'une des deux voies, nous serons obligés par la suite de prendre l'autre pour combler cette lacune. Aussi vaut-il mieux développer dès maintenant la faculté qui nous manque; c'est ainsi que nous progresserons le plus rapidement vers le but final, avec une sécurité parfaite. 

La clarté et le netteté d'une photographie dépendent de la façon dont l'objectif est mis au point par le photographe. Une fois placé, l'appareil reste stable; s'il possédait vie et volonté propre, s'il pouvait changer sa direction et sa mise au point, les images seraient brouillées. L'intellect est dans le même cas, il erre sans but, dans une véritable danse de Saint-Guy, et réagit violemment contre tout frein. Mais il peut et doit être dompté, et la persévérance est le meilleur moyen de le brider. Dans la mesure où le mental est calmé, l'esprit peut se refléter dans le corps triple, selon le principe que le soleil se mire dans une mer calme, mais que les lames houleuses font dévier ses rayons. 

Le corps vital est comme un miroir, ou plutôt comme un film de cinéma; il fixe aussi bien les images du monde extérieur, selon nos facultés d'observation, que les idées de l'Esprit intérieur selon la clarté et la discipline de l'intellect. La Consécration et le Discernement - en d'autres termes l'émotion et l'intelligence - décident de notre attitude à l'égard de ces images, et leur action équilibrée conduit à un développement bien complet. 

Evolués jusqu'à un certain point, ils déclenchent inévitablement un processus de purification. 

L'aspirant se rend compte que pour atteindre le but il doit écarter tout ce qui entrave ses progrès. Un bon mécanicien cherche à avoir les meilleurs outils et à les garder dans un ordre parfait, car il connaît leur valeur pour faire du bon travail. Nos corps sont des instruments de l'esprit; et dans la mesure où ils sont engorgés ils l'empêchent de se manifester. Le discernement nous apprend ce qui nous entrave, et la consécration à la vie supérieure nous aide à éliminer les habitudes ou traits de caractère indésirables en surmontant nos désirs instinctifs. 

La nourriture carnée, obtenue au prix de la vie et de la souffrance d'une créature amie, est imprégnée de ses désirs et de ses passions; de plus, elle est dans un état de corruption; elle n'est donc pas une nourriture pure, et aucun aspirant aux pouvoirs supérieurs ne saurait choisir de nourrir son corps avec de tels rebuts. Il étudiera le moyen de satisfaire aux besoins de son corps avec une nourriture pure. Il se rend compte de l'importance de garder son cerveau clair, pour que la conscience qui s'éveille soit largement ouverte aux influences spirituelles; par conséquent, il cessera de faire usage de tabac et d'alcool qui stimulent le cerveau, mais le laissent ensuite assoupi. La modération est un non-sens en matière de boisson; tout usage d'alcool est un excès, et un désastre pour la recherche d'acquisitions spirituelles. 

Toute forme de colère est contraire au développement spirituel; elle dissipe une grande quantité d'énergie qui pourrait être utilement employée; elle empoisonne le corps, le ruine et entrave énormément tout progrès. 

De même, toute critique est nuisible, et l'aspirant doit s'en abstenir autant que possible. Le Discernement nous apprend d'une manière impersonnelle ce qui est bon et mauvais, mais ne nous donne aucun sentiment à ce sujet, et c'est là le point capital. L'examen d'un fait, d'une idée ou d'un objet, et une décision concernant sa valeur, sont nécessaires et il ne faut jamais s'y soustraire. 

Mais toute pensée blessante doit être évitée parce qu'elle crée une forme-pensée en forme de flèche; et celle-ci en sortant de nous traverse et bloque le courant de pensées bonnes qu'irradient constamment les Frères Aînés et qui sont attirées par toute personne d'une moralité élevée. 

Deux exercices spécifiques sont donnés à l'aspirant sur le sentier de la préparation: tous deux mènent au développement de la vue et de la pénétration spirituelles. Le premier suit le chemin direct et s'adresse surtout à l'occultiste intellectuel; mais il est de grande valeur pour le mystique, parce qu'il développe la faculté qui lui manque le plus: le raisonnement. Cet exercice s'appelle la Concentration, qui produit le "pouvoir de la pensée". L'autre donne un résultat similaire d'une manière indirecte; il s'adresse surtout au mystique, mais il est de première nécessité pour l'occultiste intellectuel, parce qu'il apporte le sentiment de la vérité, qui est au-delà de la raison: cet exercice est la Rétrospection, qui développe le "pouvoir de consécration". Tous deux sont nécessaires pour atteindre un développement bien équilibré. 

Du point de vue philosophique, atteindre la vue et la pénétration spirituelles consiste à obliger le corps du désir à accomplir, à l'intérieur du corps dense et pendant que nous sommes entièrement éveillés et conscients, le même travail qu'il accomplit à l'extérieur du corps pendant le sommeil et pendant l'état qui suit la mort. 

Il existe certains courants dans le corps du désir de chaque personne. Ils sont forts, bien définis et forment sept grands tourbillons chez le clairvoyant, mais ils sont faibles, brisés et démunis de tourbillons chez l'homme ordinaire qui ne peut pas "voir". Le développement de ces courants et de ces tourbillons conduit à la vision spirituelle. Pendant le jour, alors que nous sommes absorbés dans nos occupations matérielles, ces courants sont lents; mais dès que l'homme sort du corps dense pendant le sommeil et commence le travail de restauration décrit dans la quatrième conférence, les courants s'animent et les tourbillons tournent et brillent, car le corps du désir est alors dans son élément naturel, délivré du poids embarrassant du corps matériel. 

De notre manière d'utiliser notre corps physique dans la journée, dépend le temps nécessaire au corps du désir pour accomplir son oeuvre et rétablir le rythme du corps vital et du corps physique. Si nous avons causé à notre corps, pendant la journée, une grande dépense d'énergie, l'inharmonie régnera dans la même mesure, et il faudra presque toute la nuit pour rétablir le rythme et l'harmonie: l'homme sera ainsi lié à son corps jour et nuit. Mais s'il apprend l'habileté dans l'action, s'il conserve son énergie pendant le jour, et cesse de gaspiller ses forces en paroles et en actes inutiles, s'il commence à contenir ses colères et à empêcher l'inharmonie due à des fautes d'observation, son corps du désir n'est plus occupé pendant le sommeil à restaurer le corps dense; une partie de la nuit peut être employée pour le travail à l'extérieur. Si les centres sensoriels du corps du désir sont suffisamment évolués, comme ils le sont chez la plupart des gens intelligents, l'homme peut s'esquiver et prendre son essor dans le monde du désir. Là il enregistre scènes et vues, bien qu'il ne se les rappelle habituellement pas jusqu'à ce qu'il ait effectué la séparation entre les parties supérieure et inférieure du corps vital, ainsi que nous l'avons expliqué antérieurement. 

Nous voyons donc l'importance considérable de l'observation juste, de la consécration à un idéal élevé, de l'alimentation pure: tout cela tend à harmoniser nos vibrations intérieures et extérieures. En proportion même des résultats que nous obtenons dans ces domaines, le temps nécessaire à la restauration pendant le sommeil est diminué et nous sommes libérés pour travailler dans le monde du désir. 

L'exercice du soir, la RÉTROSPECTION, est plus efficace que toute autre méthode pour faire avancer l'aspirant dans la voie du progrès. 

Il a un effet si étendu qu'il permet à chacun d'apprendre dès maintenant, non seulement les leçons de cette vie, mais aussi des leçons ordinaires réservées pour les vies futures. 

Une fois que l'aspirant est couché, les muscles de son corps détendus, il passe en revue les scènes de la journée en ordre inverse; en commençant par les évènements de la soirée, puis il revoit les incidents de l'après-midi, de la matinée, jusqu'à son réveil. Il s'efforce de se représenter chaque scène aussi fidèlement que possible; il cherche à reproduire devant son mental tout ce qui a eu lieu dans chaque scène vécue en jugeant ses actions, en s'assurant si ses mots ont bien eu le sens voulu ou ont au contraire donné une fausse impression; il doit chercher s'il n'a ni exagéré ni amoindri les faits en les exposants à d'autres. Il passe en revue son attitude morale en rapport avec chaque scène: aux repas, a-t-il mangé pour vivre, ou a-t-il vécu pour manger, pour flatter son palais? qu'il se juge lui-même et se blâme où il doit être blâmé, et se loue lorsqu'il l'a mérité. 

L'aspirant trouve parfois difficile de rester éveillé jusqu'à la fin de l'exercice. Dans de tels cas, il est permis de s'asseoir dans son lit, jusqu'à ce qu'il soit possible de suivre la méthode ordinaire. 

La valeur de la rétrospection est énorme et dépasse de beaucoup tout ce qu'on peut imaginer. En premier lieu, ce travail de rétablissement de l'harmonie est accompli en pleine conscience et en un temps plus court que ne peut le faire le corps du désir pendant le sommeil, ce qui laisse une grande partie de la nuit disponible pour travailler à l'extérieur. En second lieu, l'aspirant vit chaque nuit son purgatoire et son premier ciel, et fixe ainsi dans l'esprit sous forme de Sentiment juste l'essence de l'expérience de la journée: il échappe ainsi au purgatoire après la mort et gagne une partie du temps qu'il aurait à passer au premier ciel. Enfin, dernier avantage mais non le moindre, ayant extrait jour après jour, et fixé dans l'esprit l'essence des expériences qui contribuent à développer l'âme, il se développe et vit réellement avec une attitude d'esprit réservée ordinairement pour des vies futures. 

Par l'accomplissement fidèle de cet exercice, nous expurgeons jour par jour de notre mémoire sub-consciente des faits indésirables: ainsi nos péchés sont effacés, notre aura commence à briller de l'or spirituel que la rétrospection extrait des expériences de chaque jour; et ainsi nous attirons l'attention de l'Instructeur. 

Les purs verront Dieu, a dit le Christ, et l'Instructeur bientôt ouvrira nos yeux lorsque nous serons prêts à entrer dans le "Lieu de la connaissance", le monde du désir, où nous obtenons nos premières expériences de la vie consciente sans le corps physique. 

La CONCENTRATION, le second exercice, est accompli le matin au moment du réveil de l'aspirant. Celui-ci ne doit pas se lever pour ouvrir les volets, ni accomplir aucun autre acte qui ne serait pas nécessaire. Si son corps est à l'aise, il doit aussitôt le mettre en état de détente et commencer à se concentrer. Ceci est très important, car l'Esprit vient juste de rentrer du monde du désir à l'instant du réveil, et à ce moment le contact de la conscience avec ce monde est plus facilement retrouvé qu'à n'importe quel autre instant de la journée. 

Si le corps n'est pas à l'aise, l'aspirant peut se lever avant l'exercice, mais par suite de ce retard, la concentration de la pensée est beaucoup moins efficace. 

La quatrième conférence nous a appris que pendant le sommeil, les courants du corps du désir sont en mouvement et que ses tourbillons sont extrêmement rapides. Mais dès qu'il rentre dans le corps physique, ces courants et tourbillons sont presque arrêtés par la matière dense, et aussi par les courants nerveux du corps vital, porteurs des messages qui vont et viennent au cerveau. L'exercice du matin a pour objectif de réduire le corps physique au même degré d'inertie et d'insensibilité que pendant le sommeil, l'Esprit restant en lui parfaitement éveillé, alerte et conscient. Nous créons ainsi un état dans lequel les centres sensoriels du corps du désir peuvent commencer à tourner même pendant qu'ils sont dans le corps physique. 

Concentration est un mot qui intrigue beaucoup de gens et n'a de signification que pour bien peu; aussi nous efforcerons-nous de rendre son sens bien clair. Le dictionnaire donne plusieurs définitions, toutes applicables à notre idée. L'une est: "grouper dans un centre"; une autre tirée de la chimie: "réduire à une pureté et à une force extrêmes par le rejet de constituants dénués de valeur". Appliquée à notre problème, l'une des définitions ci-dessus nous dit que si nous fixons nos pensées sur un centre, un point, nous augmentons leur force, de même que le pouvoir des rayons solaires est augmenté lorsqu'ils sont concentrés au foyer d'une loupe. En éliminant de notre mental pour un temps donné tous les autres sujets, notre pouvoir de pensée est tout entier utilisable pour atteindre l'objet ou résoudre le problème sur lequels nous nous concentrons; nous pouvons nous absorber dans notre sujet au point que le canon pourrait être tiré au-dessus de nos têtes sans que nous l'entendions. Certaines personnes se perdent à tel point dans un livre qu'elles oublient tout le reste: l'aspirant à la vision spirituelle doit acquérir la faculté de s'absorber à ce même degré dans l'idée sur laquelle il se concentre, de manière à exclure le monde sensoriel de sa conscience et à donner son attention tout entière au monde spirituel. Lorsqu'il aura appris à le faire, il verra le côté spirituel d'un objet ou d'une idée illuminé par la lumière spirituelle, et il obtiendra ainsi une connaissance de la nature intime des choses que ne peut imaginer l'homme ordinaire. 

Lorsque l'aspirant a atteint ce degré d'abstraction, les centres sensoriels de son corps du désir commencent à tourner lentement dans le corps physique et s'y font ainsi une place; avec le temps cette place se précisera de plus en plus, et il faudra de moins en moins d'efforts pour les mettre en mouvement. 

Le sujet de la concentration peut être n'importe quel idéal élevé et sublime, mais doit de préférence être de nature à emmener l'aspirant loin des choses ordinaires perceptibles aux sens, au-delà du temps et de l'espace; et il n'y a pas de meilleur sujet que les cinq premiers versets de l'Evangile de Saint Jean. En les prenant phrase par phrase, chaque matin, ils donneront à l'aspirant, avec le temps, une connaissance intérieure merveilleuse de l'origine de notre univers et de la méthode de création, connaissance bien supérieure à celle d'un enseignement livresque. 

Après un certain temps, lorsque l'aspirant a appris à conserver devant lui sans flottement pendant cinq minutes l'idée sur laquelle il se concentre, il peut essayer d'abandonner brusquement cette idée et de laisser se produire un vide. Qu'il ne pense à rien, attendant simplement pour voir si quelque chose entrera dans ce vide. un moment viendra où les visions et les scènes du monde du désir rempliront l'espace vide. Après s'y être habitué, l'aspirant pourra demander que telle ou telle chose se présente à lui: elle viendra, et il pourra l'étudier. 

Le point capital, cependant, est qu'en suivant ces instructions, l'aspirant se purifie; son aura commence à briller et attirera nécessairement l'attention d'un Instructeur; celui-ci enverra quelqu'un pour l'aider à faire un pas de plus sur le sentier du développement. Même si des mois et des années s'écoulent et n'apportent pas de résultat visible, aucun effort n'est jamais vain; les grands Instructeurs voient et apprécient nos efforts; ils sont aussi désireux d'avoir notre aide que nous le sommes de travailler. Ils peuvent voir des raisons qui rendent inopportun pour nous de travailler pour l'humanité, soit dans cette vie, soit seulement pour le moment; lorsque les conditions restrictives disparaîtront, nous serons admis à la lumière qui nous permettra de voir par nous-mêmes. 

Une vieille légende dit que la recherche d'un trésor doit être faite dans le calme de la nuit et dans le silence absolu; dire un mot avant que le trésor ait été extrait en toute sécurité le fera inévitablement disparaître. C'est là une parabole mystique qui a trait à la recherche de l'illumination spirituelle. Si nous bavardons, ou racontons à d'autres les expériences de notre heure de concentration, nous les perdons: elles ne supportent pas la transmission orale, et s'évanouiront en fumée à moins que nos méditations en tirent une pleine connaissance des lois cosmiques profondes; même alors l'expérience en elle-même sera sans intérêt, car nous nous apercevrons qu'elle est seulement la coque qui cachait l'amande. La loi a une valeur universelle, comme nous le verrons aussitôt, car elle explique les faits de la vie et nous apprend comment utiliser avantageusement certaines conditions et en éviter d'autres. La loi peut être librement enseignée au gré de celui qui la découvre, pour le bien de l'humanité: l'expérience qui a révélé la loi apparaît alors dans sa vraie lumière et son intérêt n'est que passager. Ainsi, l'aspirant doit regarder tout ce qui se produit pendant la concentration comme sacré, et le garder strictement pour lui-même. 

Enfin, qu'il évite de considérer les exercices comme un devoir ennuyeux; qu'il les estime à leur véritable valeur: ils sont notre privilège le plus grand. C'est seulement en les appréciant comme tels que nous leur rendons justice et que nous en tirons le maximum de bénéfice. 

Dans The Rosicrucian Fellowship, les Frères Aînés distinguent trois classes: 

1 - Les Etudiants qui étudient simplement la Philosophie. Des personnes de religions diverses entrent dans les établissements d'enseignement comme Harvard ou Yale, et y étudient la mythologie, la psychologie et les religions comparées sans préjudice pour leurs affinités religieuses. Les étudiants peuvent s'affilier à The Rosicrucian Fellowship sur les mêmes bases. Tout le monde y est reçu à condition de n'être ni hypnotiseur, ni médium, chiromancien ou astrologue professionnel. 

2 - Les Candidats qui sont des étudiants mais qui aspirent à une connaissance directe les mettant à même de servir l'humanité. Sur demande, le Siège envoie à tout aspirant, ayant donné des preuves de sa fidélité, un texte d'engagement dans lequel l'aspirant se promet à lui-même d'exécuter fidèlement les deux exercices, d'en établir un compte rendu quotidien et d'envoyer ce compte rendu chaque mois au Siège. 

Le temps de probation est d'au moins cinq ans; il a pour but de mettre à l'épreuve la volonté et la persévérance de l'aspirant, et de lui donner la possibilité de se purifier lui-même avant d'aborder les méthodes de développement plus directes qu'implique l'état de disciple. Le compte rendu doit aider l'aspirant dans l'accomplissement de ses exercices: il est humain de vouloir faire la meilleure impression possible, et l'aspirant essaiera de faire mieux s'il sait que son travail est vérifié. 

Toute personne qui a été inscrite pendant au moins deux ans comme étudiant et qui est assez convaincue de la véracité de ces enseignements pour être prête à rompre toute attache avec d'autres ordres spirituels ou religieux - les Eglises Chrétiennes et les Ordres Fraternels exceptés - peut prendre l'engagement l'admettant au rang de Candidat. 

Nous ne voulons pas dire par là que toutes les autres écoles spirituelles sont sans valeur; loin de là. Bien des chemins mènent à Rome, mais nous y parviendrons avec bien moins d'efforts si nous suivons l'un d'entre eux seulement, au lieu de zigzaguer de sentier en sentier. D'abord, notre temps et nos forces sont limités; ils sont aussi réduits par la famille et les devoirs sociaux que nous ne devons pas négliger pour notre développement personnel. C'est pour ménager l'énergie légitimement utilisable pour nous-mêmes, et pour éviter le gaspillage des rares instants dont nous disposons, qu'il est demandé d'abandonner tous les autres ordres. 

Le monde nous présente beaucoup d'occasions à saisir, mais pour cela, nos efforts doivent se concentrer dans une seule direction bien définie. Le développement de nos pouvoirs spirituels nous rendra capables d'aider nos frères plus faibles, ou de leur nuire: il n'est justifiable que s'il a le service de l'humanité comme objet. 

La méthode Rosicrucienne d'accomplissement personnel diffère des autres systèmes par une particularité: elle vise, dès le début, à émanciper l'élève de toute dépendance envers les autres; elle lui apprend à ne compter que sur lui-même, afin de pouvoir affronter, seul, toutes les situations et de résoudre tous les problèmes qu'il rencontre. Seul, celui dont le caractère est aussi solidement équilibré peut aider les faibles. 

Lorsqu'un certain nombre de personnes se réunissent pour se développer d'une manière négative, les résultats sont en général obtenus en peu de temps, en vertu du principe qu'il est plus aisé de suivre le courant que de le remonter. Le médium n'est pas maître de ses actes, il n'est que l'esclave d'un esprit-contrôle; aussi les Candidats doivent-ils éviter de telles réunions. 

Même les groupes qui se réunissent avec une attitude mentale positive sont déconseillés par les Frères Aînés, parce que les facultés latentes de tous les membres s'additionnent, et les visions des mondes intérieurs qu'on y obtient sont dues en partie aux facultés des autres. La chaleur du charbon au centre du foyer est augmentée par celle des charbons qui l'entourent; ainsi, le clairvoyant produit dans un cercle d'études, si positif soit-il, est comme une plante de serre chaude obtenue artificiellement: il est trop dépendant de l'entourage pour qu'on puisse lui confier le soin de s'occuper des autres. 

C'est pourquoi chaque Candidat de The Rosicrucian Fellowship accomplit ses exercices dans la retraite de sa chambre. Les résultats sont plus lents à obtenir par ce système, mais lorsqu'ils se manifesteront, ils apparaîtront comme des pouvoirs cultivés par lui-même et utilisables indépendamment de toute autre personne. De plus, les méthodes Rosicruciennes forment le caractère en même temps qu'elles développent les facultés spirituelles, et protègent ainsi l'élève contre la tentation de sacrifier des facultés divines pour des gains matériels. 

Tout ce qui précède n'implique pas que le Candidat doive donner tout son temps à l'effort spirituel. S'il ne peut donner plus, cinq minutes le matin et quinze le soir suffiront. En fait, consacrer au développement des facultés spirituelles du temps qui pourrait être employé en un effort matériel légitime serait une erreur: nous devons accomplir tout notre service sur le plan matériel avant de pouvoir servir dans les mondes spirituels. 

Quiconque est infidèle à son devoir terrestre ne peut être fidèle à son travail spirituel. 

Lorsque soixante comptes rendus consécutifs auront été reçus par le Siège, le Candidat pourra faire une demande pour l'instruction individuelle, qui lui sera donnée si les Frères Aînés le jugent opportun. 

3 - Les Disciples, qui ont terminé leur temps de probation et ont été acceptés par les Frères Aînés; ils reçoivent l'instruction individuelle. 



LISTE DES DOCUMENTS ° LIST OF DOCUMENTS