MINCHIATE DU MUSÉE CORRER
À
VENISE
1506
Copie d'une version du Musée Correr à Venise (sans le Fou)
N° 0 - Le Fou | ||||||
N° 1 - Le Joueur | ||||||
N° 2 - Le Grand Duc | ||||||
N° 3 - L'Empereur d'Occident | ||||||
N° 4 - L'Empereur d'Orient | ||||||
N° 5 - L'Amour | ||||||
N° 6 - La Tempérance | ||||||
N° 7 - La Force | ||||||
N° 8 - La Justice | ||||||
N° 9 - La Roue de Fortune | ||||||
N° 10 - Le Chariot | ||||||
N° 11 - Le Temps | ||||||
N° 12 - Le Pendu | ||||||
N° 13 - La Mort | ||||||
N° 14 - Le Diable | ||||||
N° 15 - La Maison du Diable | ||||||
N° 16 - L'Espoir | ||||||
N° 17 - La Prudence | ||||||
N° 18 - La Foi | ||||||
N° 19 - La Charité | ||||||
N° 20 - Le Feu | ||||||
N° 21 - L'Eau | ||||||
N° 22 - La Terre | ||||||
N° 23 - L'Air | ||||||
N° 24 - La Balance | ||||||
N° 25 - La Vierge | ||||||
N° 26 - Le Scorpion | ||||||
N° 27 - Le Bélier | ||||||
N° 28 - Le Capricorne | ||||||
N° 29 - Le Sagittaire | ||||||
N° 30 - Le Cancer | ||||||
N° 31 - Les Poissons | ||||||
N° 32 - Le Verseau | ||||||
N° 33 - Le Lion | ||||||
N° 34 - Le Taureau | ||||||
N° 35 - Les Gémeaux | ||||||
N° 36 - L'Etoile | ||||||
N° 37 - La Lune | ||||||
N° 38 - Le Soleil | ||||||
N° 39 - Les Trompettes | ||||||
N° 40 - Le Monde |
Le
Minchiate, ou « Jeu du Fou », originaire de Florence en Toscane (autrefois
l’Etrurie), est constitué des 78 lames ou arcanes (majeures et mineures) d’un
tarot classique, mais « augmenté » de 20 arcanes majeurs (le Pape du tarot
classique étant soustrait, cela porte le nombre d’arcanes majeurs à 41, et le nombre total de cartes,
lames mineures incluses, à 97).
Dans les
divers Minchiates connus, l’ordre des lames majeures est sensiblement différent
de l’ordre des lames du tarot classique, certaines n’étant d’ailleurs pas
toujours numérotées.
Les « lames
majeures ajoutées » font référence aux Quatre Eléments (Air, Terre, Eau, Feu);
aux 12 signes du Zodiaque (mais se succédant ici de manière assez
particulière); aux Vertus cardinales
(Prudence, Tempérance, Force et Justice); et aux Vertus théologales (Foi,
Espérance, Charité).
Par
ailleurs, certaines lames du tarot classique sont modifiées tant au niveau de
la dénomination que du contenu symbolique :
la Papesse devient le Grand-Duc, l'Impératrice devient l'Empereur
d'Occident, l’Empereur est dit « d’Orient », la Maison-Dieu devient la Maison
du Diable, le Jugement devient les Trompettes…
On trouvera ci-après un article de Thierry Depaulis précisant quelques aspects
historiques et symboliques des Minchiates.
Le Minchiate
Le jeu de
minchiate est une spécialité florentine à 97 cartes qui remonte, selon toute
probabilité, au début du XVIe siècle. Il est déjà mentionné en 1543 dans Le
Carte Parlanti de l'Arétin sous le terme germini (la forme minchiate n'a été
adoptée qu'au siècle suivant).
Loin de
décliner comme son cousin classique à 78 cartes, il prit au XVIIe et, surtout,
au XVIIIe siècle un essor prodigieux, s'étendant dans l'Italie entière,
jusqu'en Sicile – où il ne dura pas. Même les cartiers bolonais s'illustrèrent
dans sa production et les témoignages sont nombreux qui attestent sa vogue, tel
celui du Président de Brosses en 1755 à Rome.
Un tel
engouement ne devait manquer de passer les frontières : il s'imprima à
Nuremberg, en 1769, et à Dresde, en 1798, des règles du jeu, traduites ou
adaptées de l'italien, destinées aux joueurs allemands. On ne sait, à vrai
dire, si elles eurent quelque succès. En France aussi une tentative fut faite :
la Règle du jeu des Minquiattes, qui doit dater de la même époque, en fait foi.
Le minchiate
est le fruit d'une augmentation : aux 78 cartes traditionnelles (22 lames
majeures ou atouts et 56 lames mineures) on a ajouté, en bloc, 20 atouts
supplémentaires (la vertu cardinale manquante, la Prudence, les trois vertus
théologales, ainsi que les quatre éléments et les 12 signes du Zodiaque). Le
Pape ayant disparu dans l'opération, on arrive à un total de 97 cartes.
Papesse, Empereur et Impératrice sont devenus respectivement le « Grand Duc »,
l'« Empereur d'Occident » et l'« Empereur d'Orient », tous imperturbablement
nommés papi (« papes ») par les joueurs.
A ces
particularités le minchiate en ajoute d'autres qui intriguent les spécialistes
: les Épées apparaissent ici comme des glaives droits, les cavaliers sont
tantôt des centaures (Épées et Bâtons), tantôt des monstres mi-humains, et les valets
de Coupes et de Deniers sont des personnages féminins (« fantine »).
Au-delà de
l'étrangeté de nombre des atouts, si l'on retire les 20 cartes additionnelles,
on retrouve la série traditionnelle qui dut être à l'origine du minchiate. Par
bien des égards (ordre des atouts, repères stylistiques) les 77 cartes
restantes sont inspirées de celles du Tarot Bolonais. Il y a tout lieu de
penser que ce dernier s'installa à Florence à la fin du XVe siècle ou au début
du XVIe, puis qu'il donna naissance aux germini/minchiate. Issu d'une tradition
graphique représentée ici par les feuilles « Rosenwald », ainsi que par les
cartes lucquoises à la marque « Orfeo », le minchiate s'inscrit clairement dans
la mouvance de la tradition bolonaise.
Les monstres
ont toujours une fin et le minchiate n'y échappa pas : il dut disparaître de
Rome au début du XIXe siècle et s'éteignit lentement mais inexorablement à
Florence dans la deuxième moitié du XIXe. Le minchiate appartient désormais au
passé et aux rêves des collectionneurs.
Thierry
Depaulis, "Tarot, jeu et magie"